Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique
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Composition


Jacques Crickillon


Jacques Crickillon / Photo © Jean-Luc Lossignol, ARLLFB Membre belge littéraire du 17 avril 1993 au 11 février 2021.
Prédécesseur : Marcel Lobet
Successeur : Nathalie Skowronek
Fauteuil 20
www.jacquescrickillon.be

Biographie

Jacques Crickillon naît à Bruxelles le 13 septembre 1940. Né en pleine tourmente, il sera marqué par le sentiment tragique de l’existence. Il puisera dans cette expérience une révolte inextinguible, doublée d’une inlassable soif d’harmonie dont il comprendra qu’elle n’est accessible qu’au prix du courage intellectuel et de la volonté visionnaire.

Il est, dès l’enfance, fasciné par l’aventure et par le voyage, et ce qu’il ne pourra longtemps assouvir que dans les livres, il le concrétisera plus tard. L’apprentissage de Crickillon est double, en effet. Il se prépare d’abord au métier d’instituteur, puis est licencié en philologie romane à l’Université libre de Bruxelles. Très tôt, les lointains l’attirent et différentes missions lui permettent de parcourir, parfois au cours de séjours prolongés, la planète : Afrique, Égypte, Zaïre, Asie, notamment au Cambodge et au Népal. Un réservoir de choses vues va se constituer ainsi, à son insu peut-être, mais qui alimentera durablement son écriture. D’un côté, l’examen des textes, une étude approfondie de l’œuvre de Michaux notamment, tout ce que son bagage universitaire lui aura apporté (et qui lui permettra d’enseigner à l’Athénée de Schaerbeek, ainsi qu’au Conservatoire de Bruxelles); de l’autre des périples fondateurs : tout est en place pour qu’un écrivain prenne figure.

Albert Ayguesparse avait accueilli ces poèmes initiaux dans la revue Marginales : ils s’imposèrent d’emblée par leur puissance d’inspiration, leur originalité de forme et leur intensité à l’attention des observateurs de la vie littéraire. Et la parution de La Défendue (1968) fut perçue comme la révélation éclatante d’un écrivain, surgi tout armé du silence, fort d’une thématique éminemment personnelle, d’une science de l’écriture forgée au voisinage des plus grands, et d’une perception du monde et de l’inscription de l’humain dans ce monde, d’entrée de jeu cosmique. La figure de Ferry, l’amoureuse et l’épouse, sera désormais en filigrane de nombreux livres et convoquée sous différents noms : la Défendue, Lorna Lherne, Nana Sumatra Lorna ou Lorna de l’Our… «autant d’yeux d’éternelle pour votre aveugle ivre de Lorna» écrira-t-il dans son dernier opus, Litanies (2016).

Quatre recueils suivraient, à un rythme soutenu, portés par une même fièvre lyrique, mais aussi contrôlés par une égale maîtrise : L’Ombre du prince (1971), La Barrière blanche (1974), La Guerre sainte (1975) et À visage fermé (1976). Cette suite impressionnante, publiée chez De Rache, où l’imagerie luxuriante se déploie selon une prosodie ample et symphonique, impose Crickillon comme un auteur majeur, que couronne d’ailleurs, en 1977, le prix triennal de littérature réservé à la poésie. Cercle Afanema (Le Taillis Pré, 2000) regroupe ce cycle de cinq publications.

On assiste alors à une nouvelle orientation de l’imaginaire du poète. Une colère monte en lui et ces inquiétudes sont perceptibles dans les textes de Région interdite et de Régions insoumises, tous deux de 1978, et culmineront dans Colonie de la mémoire (1979), dont on a pu dire à juste titre qu’il s’agissait d’un recueil pivot, parce que l’arsenal du poète s’y enrichit d’une réflexion élargie sur l’entropie qui emporte le monde et l’humanité, et d’un regard critique sur les pouvoirs et les possibles de l’écriture.

C’est le moment où Crickillon aborde la prose : Supra-Coronada (La Renaissance du livre, 1980) lui vaut d’emblée le prix Rossel. D’autres ensembles de récits virulents suivront, où l’auteur exalte, en l’élevant au niveau du lyrisme, un univers dont il a puisé les sources dans le roman noir et la littérature d’anticipation, deux domaines qu’il affectionne, et dont il mesure les pouvoirs d’élucidation du présent et de l’avenir. Cette pratique de la narration, qui ne trahit jamais les pouvoirs de la poésie, développe chez Crickillon une forme d’écriture duelle, dont témoignent aussi bien L’Indien de la gare du Nord (1985), imprécation dans les murs de la ville, que son roman Le Tueur birman (1987), où l’argument fictionnel est renforcé par la dynamique d’une langue sans cesse rechargée d’énergie. Cette fascination pour le fantastique, on la retrouve dans Compagnons d’aventure (Samsa/ARLLFB, 2015), ses chroniques de science-fiction, fantasy et fantastique.

Avec Grand Paradis, Sphère, Neuf Royaumes, Vide et Voyageur, Ténébrées ou Élégies d’Evolène, ces ouvrages parus entre 1988 et 1995, la poésie de Crickillon prend une tournure plus radicalement philosophique. La fréquentation des penseurs orientaux, la recherche constante de l’élévation (qui se marque aussi par la passion qu’éprouve le poète pour la montagne et son inlassable exploration) confèrent à ses livres une hauteur de vue, une pénétration lucide des mystères, un sens du sacré qui les dotent d’une réelle dimension initiatique.

S’il est essentiellement poète, Crickillon a abordé d’autres genres littéraires. Le théâtre et des dramatiques radiophoniques (Sommeil blanc, Le Cri de Tarzan, etc.), l’essai (André Miguel, Oberland, Montagne romantique, etc.) mais également des œuvres pour la jeunesse (Les Oreilles-Coquillages, Contes de la plume et du papier, etc.).

À partir de l’an 2000, Crickillon confiera ses volumes de poésie au Taillis Pré. Ainsi paraîtront À Kénalon, Le Bois de Pluie (2006) ou Le Bois de Cendre (2008) dont Christophe Van Rossom dira : «Ceci n’est pas un livre, un poème, une narration. C’est un couteau sanglant, c’est un portrait sans fard du poète en temps de détresse.» Litanies (2016) est son dernier titre publié et Jacques De Decker le salua en écrivant qu’il démontrait là «dans un invraisemblable lâcher-tout de fantasmes, de fatrasies, d’aveux et d’aventures qu’il est l’éternel trappeur des hautes terres».

Jacques Crickillon a été élu à l’Académie royale de langue et de littérature françaises le 17 avril 1993.

– Jacques De Decker et Yves Namur

Bibliographie

  • La Défendue, poésie, André De Rache, Bruxelles, 1968.
  • L'œuvre romanesque d'Albert Ayguesparse, essai, André De Rache, 1970.
  • L'Ombre du Prince, poésie, André De Rache, Bruxelles, 1971.
  • La Barrière blanche, poésie, André De Rache, Bruxelles, 1974.
  • La Guerre sainte, poésie, André De Rache, Bruxelles, 1975.
  • À visage fermé, poésie, André De Rache, Bruxelles, 1976.
  • André Miguel, essai, Rodex, Subervie, 1977.
  • Raymond Chasle L'Île-Étoile, Amay, Vérités, Amay, 1978.
  • Régions insoumises, poésie, Amay, Vérités, 1978.
  • Région interdite, avec 11 collages de Ferry C., poésie, Bruxelles, Cyclope, 1978.
  • «Approche de Tao», dans La Boîte à poèmes : Jacques Crickillon, poésie, Amay, Vérités, 1979.
  • «Cinq Récits», dans Bruxelles à mur ouvert, photographies de Michel Huisman, récits, Bruxelles, Vokaer, 1980.
  • Supra-Coronada, roman, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1980.
  • Colonie de la Mémoire, poésie, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1979.
  • Nuit la Neige, avec 11 collages de Ferry C., poésie, Amay, Vérités, Amay, 1981.
  • Retour à Tawani, poésie, Paris, Belfond, 1983.
  • Parcours 109, roman, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1983.
  • La Nuit du Seigneur, roman, Bruxelles, Paul Legrain, 1984.
  • L'Indien de la Gare du Nord, poésie, Paris, Belfond, 1985 (rééd. Lausanne, L'Âge d'Homme, 2000).
  • Le Tireur birman, roman, Paris, Belfond, 1987.
  • Grand Paradis, poésie, Lausanne, L'Âge d'Homme, 1988.
  • Sphère, poésie, Lausanne, L'Âge d'Homme, 1991.
  • Les Oreilles-Coquillages, sous le nom de Frank Paradis, roman, Bruxelles, Pré aux Sources, 1991.
  • Neuf Royaumes, poésie, Amay, L'Arbre à Paroles, 1991.
  • Enfant avec cravate et peintures de guerre, sous le nom de Frank Paradis, roman, Bruxelles, Pré aux Sources, 1992.
  • Vide et Voyageur, poésie, Lausanne, L'Âge d'Homme, 1993.
  • Ténébrées, poésie, Amay, L'Arbre à Paroles, 1993.
  • Contes de la plume et du papier, sous le nom de Frank Paradis, roman, Bruxelles, Pré aux Sources, 1993.
  • Ode à Lorna Lherne, poésie, Amay, L'Arbre à Paroles, 1994.
  • Élégies d'Évolène, poésie, Lausanne, L'Âge d'Homme, 1995.
  • Talisman, poésie, Amay, L'Arbre à Paroles, 1995.
  • Ballade de Lorna de l'Our, poésie, Amay, L'Arbre à Paroles, 1996.
  • L'Astrolabe, poésie, Bruxelles, Maelstrom, 1997.
  • Au bord des Fonderies mortes, poésie, Lausanne, L'Âge d'Homme, 1998.
  • Oberland, Montagne romantique, suivi d'Engadine et Montagne symboliste, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 2000.
  • La Chanson de Nana Sumatra, poésie, Lausanne, L'Âge d'Homme, Lausanne, 2001.
  • Cercle Afanema (La Défendue, L'Ombre du Prince, La Barrière blanche, La Guerre sainte, À Visage fermé), poésie, Châtelineau, Le Taillis Pré, 2001.
  • Babylone Demain, suivi de Le Tueur birman, Parcours 109 et Supra-Coronada, récits, Bruxelles, La Renaissance du Livre, coll. «Les Maîtres de l'Imaginaire», 2001.
  • A Kénalon I, récits, Châtelineau, Le Taillis Pré, 2004.
  • A Kénalon II, récits, Châtelineau, Le Taillis Pré, 2005.
  • Le Bois de pluie, roman, Châtelineau, Le Taillis Pré, 2006.
  • A Kénalon I et II, sous coffret, avec un collage de Ferry C., récits, Châtelineau, Le Taillis Pré, 2006.

Bibliographie critique

  • La boîte à poèmes : Jacques Crickillon, Amay, Vérités, 1979.
  • Christophe Van Rossom, Jacques Crickillon : la vision et le souffle, Avin, Éditions Luce Wilquin, 2003.
  • Liber Amicorum [en ligne]

E-bibliothèque

Communications

Discours de réception (séance publique du 26 février 2004)



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