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Caroline Lamarche

Caroline Lamarche Membre belge littéraire
Élue le 11 octobre 2014
Prédécesseur : Alain Bosquet de Thoran
Fauteuil 17

Biographie

Née à Liège, le 3 mars 1955, Caroline Lamarche a passé sa petite enfance en Espagne (Asturies) où son père est appelé à travailler comme ingénieur des mines. Quant à son enfance, elle a pour cadre la région parisienne et, plus précisément, Versailles où elle fréquente l’école primaire, mais également la forêt de Rambouillet dans laquelle elle aimera écouter le brame des cerfs, «ce grand mystère brutal et sauvage du rut des animaux sauvages» dont son œuvre s’est, plus d’une fois, emparée. Après un baccalauréat et une licence en philologie romane, elle a enseigné à Liège et au Nigeria mais, aujourd’hui, elle se consacre entièrement à son métier d’autrice.

Elle entre en littérature, dès 1991, avec un recueil de poèmes, L’Arbre rouge, publié chez Caractères, ce qui lui vaut de faire la connaissance de Paul Willems à Missembourg. En 1995 paraît, chez Spengler, La Nuit l’après-midi, roman réédité aux Éditions de Minuit (1998) et étiqueté «sadomasochiste» comme les Carnets d’une soumise de province (Gallimard, 2004).

Mais c’est avec Le Jour du chien (Éditions de Minuit, 1996), prix Rossel, que Caroline Lamarche se fait vraiment connaître du grand public. C’est l’histoire d’un chien qu’auront croisé six personnages si différents les uns des autres et qui donnera à chacun de ces protagonistes une leçon sur leur propre condition.

Elle pratique également, avec bonheur, la forme brève et, en particulier, la nouvelle. On lui doit, dans ce registre, J’ai cent ans, publié d’abord à l’Âge d’Homme et réédité au Serpent à Plumes (1999). Quinze nouvelles, tantôt réalistes, tantôt fantastiques qui sont, à coup sûr, le terreau des romans qu’elle publiera par la suite et révèlent «la subtile ironie, aussi discrète que ravageuse» dont elle peut faire preuve. La publication de Nous sommes à la lisière (Gallimard, 2019) viendra confirmer, s’il le fallait encore, son talent de nouvelliste. Cet ouvrage, par ailleurs, lui vaudra le prix Goncourt de la nouvelle 2019. Neuf nouvelles qui nous placent à la frontière de deux mondes, «là où se croisent humains en déroute et animaux semi-sauvages», où l’on passe d’une cane, d’un cheval, d’un rat ou d’un nid de fourmis aux pas rageurs d’un promeneur en forêt quand ce n’est à la folie d’un bel inconnu. Un livre dont la leçon principale est de nous convaincre de «l’interdépendance de toutes les créatures vivantes», qu’elles soient humaines ou animales.

Si elle est l’autrice (mot qu’elle affectionne tout particulièrement et dont elle souhaite s’emparer pour défendre la cause des femmes) de recueils de poèmes — citons Enfin mort (Le Cormier, 2014) ou Le Festin des morts (Tétras Lyre, 2014) — , si elle a écrit quelques ouvrages pour la jeunesse dont Le Phoque (Éditions du Rouergue, 2008) et La Poupée de Monsieur Silence (Frémok, 2018), des fictions ou des pièces radiophoniques pour la RTBF ou France Culture — par exemple L’Autre Langue (2003), L’Âme et la viande (2003) ou Crimen Amoris (2015) — Caroline Lamarche a construit, à ce jour, une œuvre exigeante de romancière qui comprend une bonne dizaine de titres.

Certaines publications telles La Nuit l’après-midi (Éditions de Minuit, 1998), les Carnets d’une soumise de province (Gallimard, 2004), Karl et Lola (Gallimard, 2007) ou La Barbière (Les Impressions Nouvelles, 2007) ont été cataloguées, peut-être à tort, comme littérature érotique, genre que l’autrice semble avoir abandonné depuis. N’étaient-ils pas, tout simplement, des livres d’amour qui révélaient «la trajectoire d’une femme de plus en plus autonome»? Et l’intérêt qu’on peut porter à ce pan de la littérature n’est-il pas, comme elle l’écrit elle-même, «l’intérêt pour l’amour, la guerre des sexes, la connaissance par les limites, un lieu passionnant d’observation»?
Mais Caroline Lamarche est aussi la romancière, héritière, selon ses propres vœux, de George Sand, Virginia Woolf, Karen Blixen ou Flannery O’Connor, en ce sens qu’elle souhaitait «avant de devenir écrivaine, endosser le costume de l’écrivain, qui leur va si bien, et conquérir, en mariant le nom de femme à celui d’écrivain, l’androgynie indispensable à [sa] fonction». Parmi ses romans, tous publiés à l’enseigne des éditions Gallimard, il faut citer L’Ours (2000), Lettres du pays froid (2003), La Chienne de Naha (2012), La Mémoire de l’air (2014) et Dans la maison un grand cerf (2017). Autant de romans où les êtres s’affrontent, sont mis à l’épreuve, connaissent les blessures profondes ou les amours perdues.

«C’est, écrit Jérôme Garcin à propos de L’Ours, à la fois une caresse et une brûlure» et tous ses romans empruntent effectivement ce chemin-là : entre bien et mal, entre dominés et dominants, entre passion et raison. Des romans où les êtres sont en grande souffrance, comme celle évoquée dans La Mémoire de l’air, où la rêveuse et la morte se ressemblent, où la violence faite aux femmes et à la narratrice est abordée sans détours. L’autrice, qui a souvent traité de la mort, de la cruauté dans la vie et l’amour, est donc une femme résolument engagée.

Son engagement, on le trouve aussi dans la société civile : à la Scam (Société civile des auteurs multimédia), dans des associations pro-environnement et, de manière plus générale, comme citoyenne présente sur plusieurs fronts. Dans une chronique intitulée Notre peine bien aimée, Caroline Lamarche écrivait, citant Paul Valéry : «Tout homme crée sans le savoir comme il respire mais l’artiste se sent créer. Son acte engage tout son être, sa peine bien aimée le fortifie.» L’œuvre de Caroline Lamarche est à l’image de cette sentence.

Caroline Lamarche a été élue à l’Académie le 11 octobre 2014, elle y succède à Alain Bosquet de Thoran.

– Yves Namur

Bibliographie

E-bibliothèque

Communications

Discours de réception (séance publique du 24 octobre 2015)

  • Discours d'Yves Namur (PDF - 73Ko)
  • Discours de Caroline Lamarche (PDF - 72Ko)


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