BiographieLouis Piérard naît le 6 février 1886, dans le Hainaut, à Frameries, au sein d'une famille modeste. Aîné de quatre enfants, fils d'un artisan, il grandit parmi les mineurs du Borinage et fréquente l'Athénée royal de Mons, où il se révèle un brillant élève. Dès 1902, il crée l'Université populaire de Frameries. Il y accueillera des personnalités du monde artistique et littéraire : Montald, Destrée ou Verhaeren.
À vingt ans, Louis Piérard entre à L'Avenir du Borinage puis au Journal de Charleroi; il publie des vers, London Sketches, dans la Revue de Belgique. Il fait partie de l'équipe de la revue Antée, d'Isi Collin, où il est chargé de la rubrique de la vie populaire; sa signature côtoie celles de Vandeputte, Gide ou Maeterlinck. Passé à La Meuse, il s'installe à Bruxelles et collabore au Soir. Son premier ouvrage, Images boraines, dédié à Verhaeren, paraît en 1907. Piérard y reprend ses évocations des brumes de la capitale anglaise, mais ce recueil, mélange subtil de forme classique et de vers libres, est d'abord un hymne à sa région natale, dont il célèbre le courage. Quand il publiera, en 1914, De flammes et de fumées, son lyrisme, essentiellement descriptif, se nourrira à la même source : le Pays noir et ses habitants astreints à une vie rude et souvent misérable. Pour lui, l'art revêt une signification sociale : il doit aider à promouvoir l'éducation du peuple, ce qui ne va pas sans un engagement personnel.
Piérard collabore à de nombreux journaux et périodiques, comme Le Thyrse, L'Art moderne, La Société nouvelle, le Pourquoi pas? ou le Mercure de France, mais aussi à des publications étrangères. En 1911, il crée sa propre revue, l'hebdomadaire illustré et humoristique Le Passant, qui n'aura que quelques mois d'existence. Au moment où le premier conflit mondial éclate, il compte à son actif une petite dizaine de publications. Il s'est attaché à la production d'artistes wallons, le graveur Bernier et le peintre Lucidel, le sculpteur impressionniste Medardo Rosso et à l'art belge en Italie, où il a voyagé en 1912. Il réunit dans un volume de pages choisies, Aimons les arbres, en 1909, des textes évoquant la magie de la nature, de Ronsard aux auteurs contemporains, tels Verhaeren et Colette. Dès 1906, Essai d'une psychologie de la nation belge, suivi cinq ans plus tard d'un volume d'études, En Wallonie, témoignent de ses préoccupations politiques et socio-culturelles : au-delà de la mise en valeur de sa région natale, Piérard se pose la question de la place de la Belgique, partagée entre deux communautés, dont il tente de définir les liens. En 1914, il écrit un livre sur Max Elskamp, orné de bois gravés par celui-ci. Il évoque son admiration pour le poète imagier et sa simplicité d'écriture.
Piérard est un homme d'action. La première guerre le voit revêtir l'uniforme du combattant. Journaliste, il donne des articles à la presse anglaise. La paix revenue, il réintègre la rédaction du Soir. En 1919, il est élu député de Mons dans la mouvance socialiste. Désormais, il jettera toutes ses forces dans la défense de la culture populaire et s'investira politiquement dans la mise en valeur des arts et des lettres. À deux reprises, il défendra fermement la proposition de loi visant à instituer un Fonds national de la littérature.
Son uvre personnelle témoigne de cet engagement. Riche d'une cinquantaine de volumes, elle est avant tout celle d'un reporter et d'un critique. Dans plusieurs livres, parmi lesquels La Belgique sous les armes, sous la botte, en exil, Piérard évoque les événements de la grande guerre.
Le critique d'art s'intéresse à La peinture belge contemporaine, quatre ans après avoir été le premier auteur à écrire un ouvrage sur Vincent Van Gogh (1924), souvent considéré comme une référence. Piérard y dépeint la passion de l'absolu qui dévore l'artiste et la lente évolution de sa personnalité sauvage et solitaire. Rik Wouters, Constantin Meunier, Édouard Manet, Pierre Paulus, Félicien Rops bénéficieront de ses talents d'observateur. Dans Le Peuple et d'autres journaux, il signe de nombreux articles sur les arts plastiques.
Piérard voyage beaucoup. On le retrouve comme reporter aux États-Unis, en Argentine, en Tchécoslovaquie, au Mexique, en Afrique du Nord, en Asie mineure. Ses souvenirs feront l'objet de plusieurs volumes, comme Films brésiliens, en 1921, reportage écrit l'année précédente lorsqu'il accompagnait le roi Albert, et Rimouski-Puebla. Du Canada au Mexique, en 1931.
Malgré de multiples occupations (par exemple la formation et la présidence du Pen Club International de Belgique en 1922, et sa nomination de bourgmestre de Bougnies, en 1932, poste qu'il occupera jusqu'à sa mort), Piérard ne cesse d'écrire et de militer. Il compose des nouvelles, Les Trois Borains et autres histoires, en 1925, poursuit sa réflexion régionale dans Visage de la Wallonie et publie son seul roman, On a volé l'Agneau mystique, en 1943. Il traduit aussi un certain nombre d'auteurs néerlandais, anglais ou espagnols.
Pendant la seconde guerre mondiale, il se retire dans le Midi de la France. Poèmes de circonstance (1913-1941) et Trois poèmes du temps de guerre (1945) montrent que l'émotion de l'écrivain et la sensibilité du patriote sont restées intactes. Rentré au pays, il publie ses Regards sur la Belgique, ensemble nostalgique composé en exil sur la patrie éloignée, et une Histoire de la Belgique, dans la collection «Que sais-je?», en 1948. Inlassablement, il poursuit son action politique et sociale; il voyage encore (Orient et Occident. Souvenirs d'Égypte, 1947).
En dépit d'un état de santé défaillant, Piérard tient à assister à un hommage à Colette, à Paris. C'est là qu'il meurt le 3 novembre 1951. Il avait été élu à l'Académie royale de langue et de littérature françaises le 13 mars 1948. – Jean Lacroix
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