Biographie
Jo van der Elst naît à Ixelles le 9 septembre 1896, dans une famille d'ascendance flamande. Nous possédons peu de renseignements sur son enfance et sa jeunesse. Au début de la première guerre mondiale, il s'engage comme volontaire dans l'armée belge, est blessé et fait prisonnier à Bioul, près de Namur. Il s'évade à trois reprises, est retrouvé trois fois, mais arrive cependant à ses fins lors d'une quatrième tentative. Il gagne la Hollande puis se révèle un brillant combattant sur le front de l'Yser; il y est nommé officier d'artillerie. La guerre terminée, il entame des études à l'Université de Louvain. En 1920, il est docteur en droit et l'année suivante, avocat à la cour d'appel de Bruxelles.
Attaché de légation dès 1922, van der Elst est à l'aube d'une grande carrière diplomatique. Il est nommé chef de cabinet du haut-commissariat de Belgique à Coblence en 1923, puis à Luxembourg et à Washington. En 1925, il est à Athènes en qualité de secrétaire de légation, puis à Vienne, où il est chargé d'affaires jusqu'en 1936; cette même année, il occupe à Prague la fonction similaire. Consul général à Vienne en 1938, il est aux premières loges pour suivre les événements internationaux qui vont bouleverser le monde et aboutir à la seconde guerre. En 1940, expulsé par les Allemands, il doit quitter son poste. Il entreprend un long voyage vers les États-Unis, via la Russie. Il est consul général à New York en 1941; il y donne une série de conférences consacrées à la Belgique et à l'art flamand dont il est un excellent connaisseur. Cette activité sera à l'origine de sa vocation tardive dans le domaine de l'écriture, une carrière parallèle qui commence en 1944 et qui s'étendra sur une dizaine d'années seulement.
L'uvre littéraire de van der Elst n'est pas très abondante; elle comprend moins de dix livres. Le premier d'entre eux est un peu l'effet du hasard. L'auteur a raconté lui-même qu'à la fin de sa tournée de conférences américaines, un éditeur de New York lui proposa de les rassembler en un volume, qui allait paraître en anglais : The Last Flowering of the Middle Age, en 1945. La traduction française, de la main de van der Elst, ne verra le jour qu'en 1951, sous le titre L'Âge d'or famand. L'écrivain d'occasion poursuit sa carrière diplomatique. Après Lisbonne, où il est envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire en 1946, c'est à Rome qu'il occupe son dernier poste, en qualité d'ambassadeur.
Depuis longtemps, Jo van der Elst est passionné par l'art flamand du XVe siècle, et il est devenu au fil des années un éminent collectionneur. Dans les Alpes-Maritimes, le diplomate possède à Biot une propriété qui contient les tableaux qui le fascinent. Dans sa maison de Bruges, restaurée dans le style ancien, et non loin de Damme, au château d'Oostkerke, où il finira ses jours, le même décor se retrouve. Sa production littéraire sera intimement liée à son attachement à la peinture, à la sculpture et à la gravure.
En 1950 paraissent trois livres, chez Nathan et au Mercure de France (aucune publication de van der Elst ne fera l'objet d'une édition dans notre pays). Des contes s'ajoutent à un ouvrage illustré sur le Portugal, qui sera traduit en portugais et publié à Lisbonne. Si ce dernier volume évoque ses sensations de séjour dans un pays d'accueil finement observé, les deux séries de contes font preuve d'une réelle originalité. Dans Six contes
six tableaux, ultérieurement traduit en anglais sous le titre Through the Picture Frame, van der Elst choisit de raconter avec finesse et humour l'histoire qui se déroule sur chaque toile qu'il sélectionne. De superbes reproductions de Vélasquez, de Fragonard, de Memlinc, de Raphaël, du Tintoret et de Rembrandt forment la trame d'une leçon artistique détaillée. L'auteur invite le lecteur à partager sa sensibilité face aux ouvres analysées par le biais d'une intelligente vulgarisation.
Les Trois Madones et autres contes flamands est dans la même ligne, mais van der Elst se limite ici aux peintres flamands du XVe siècle, Van Eyck, Memlinc, Bouts et le Maître de la légende de sainte Lucie. Il explique dans son introduction son envie d'associer ses trois jeunes enfants à ses goûts pour l'art. Grâce aux contes imaginés à partir des tableaux, il fait la démonstration de son érudition et de son souci didactique de transmettre ses connaissances. En 1951, il publie à Lisbonne, avec l'aide d'un auteur local, Arthur Mauricio, O noivo do chapeu grande e outros contos, des récits en portugais utilisant le procédé déjà décrit, textes qui seront traduits en japonais et en italien. Un ouvrage sur La Belgique, édité toujours la même année, contient des pages exaltant la beauté de nos cités, Bruges notamment, et des héliogravures de qualité.
Le livre majeur de van der Elst est L'Âge d'or flamand, qui a paru en 1951. Ce volume a intéressé Paul Éluard, qui en a reproduit des extraits dans son Anthologie des écrits sur l'art. Cet hommage vibrant à l'esprit culturel flamand est le reflet d'une admiration passionnée, aux accents nostalgiques pour un passé révolu. Les trois parties qui composent le livre cernent l'atmosphère et l'esprit du XVe siècle, les maîtres flamands et le style de l'époque qui relève autant de la dévotion religieuse que de l'imaginaire à l'état brut. En seize chapitres, van der Elst fait défiler devant les yeux du lecteur Bosch, Van der Goes, van Eyck ou Breughel en des pages grandioses, magnifiquement illustrées, qui servent encore aujourd'hui de référence pour l'étude de l'art des peintres de ce temps. En 1953, il publie un dernier ouvrage, consacré à Florence.
Le baron Jo van der Elst meurt à Oostkerke le 20 février 1971. Il avait été élu à l'Académie royale de langue et de littérature françaises le 9 janvier 1965. – Jean Lacroix
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