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Albert Counson

Albert Counson / Photo © ARLLFB Membre belge littéraire du 20 mai 1922 au 15 août 1933.
Successeur : Lucien-Paul Thomas
Fauteuil 24

Biographie

Albert Counson naît le 8 mars 1880 à Francorchamps, où son père est secrétaire communal. Il a deux frères qui, comme lui, accéderont à la carrière professorale. Après des études moyennes à l'Athénée royal de Verviers, où il est considéré comme un élève particulièrement doué, il s'inscrit à l'Université de Liège, dans la section de philologie romane. Parmi ses maîtres, figurent Maurice Wilmotte et Godefroid Kurth. C'est en 1901 qu'il obtient son doctorat en philologie romane, avec la plus grande distinction, et qu'il termine premier au concours des bourses de voyage. Après un court passage de quelques semaines à peine à l'Athénée de Huy, en qualité de surveillant intérimaire, il part pour l'Allemagne où il restera cinq ans. Il séjourne à Halle-sur-Saale, y devient élève puis lecteur chez Hermann Suchier, et peut à loisir se plonger dans l'étude du Moyen Âge.

Il y remanie sa thèse de doctorat, consacrée à Malherbe et ses sources (1904), dans laquelle il démontre les imitations, références et emprunts faits et développés par Malherbe dans son œuvre. De ces années allemandes, datent des articles de revues sur Sénèque, Hugo ou le marquis de Polignac, ainsi qu'un petit traité de Toponymie de Francorchamps (1906), très érudit, mais qui est avant tout un travail de compilation. Auparavant, il a publié les tables de la Grammaire des langues romanes de Meyer-Lübke, ainsi qu'un Petit manuel de la littérature française pour les élèves allemands, et une traduction française de l'édition d'Aucassin et Nicolette procurée par Suchier.

Mais c'est avec Dante en France, paru en 1907 à Paris (dans le même temps que de vastes articles consacrés à l'auteur de La Divine Comédie en Belgique et par rapport aux romantiques français) qu'il présente sa première œuvre importante. Il s'attaque à un domaine quasiment inexploré en notre pays à cette époque, et étudie méticuleusement les premières remarques faites sur le sujet dès la publication du livre de Dante, jusqu'aux plus récentes recherches. Il ouvre ainsi la porte à d'autres considérations et permet une meilleure compréhension du poète florentin. Plus tard, dans ses Mélanges d'histoire littéraire (1909-1910), consacrés essentiellement aux lettres françaises, il reviendra une dernière fois à Dante et l'italianisme.

Counson devient professeur à l'Université de Gand en 1907 et y est chargé des cours d'histoire des littératures romanes. On lui confie en plus, à l'École spéciale du génie civil, le cours d'exercices de langue française. Dès 1911, ses responsabilités augmentent : encyclopédie de la langue romane, exercices sur les langues romanes, grammaire comparée et grammaire historique du français. Tout en écrivant de nombreux articles sur Kant, Gœthe, Taine, Chateaubriand et Madame de Staël, Counson publie cette année-là La pensée romane, un gros volume qui est une synthèse de son cours de littérature. Les avis sont partagés : certains lui reprochent de s'attarder exclusivement au christianisme et à l'esprit franciscain, à la chevalerie française, aux saints et aux clercs, en mettant en évidence des auteurs comme Thomas d'Aquin, mais en négligeant, par exemple, l'apport de la philosophie arabe ou la part prise par la botanique ou la médecine. Ces reproches vont à l'encontre des intentions de vulgarisation de Counson, et de l'idée fondamentale qui va devenir le centre de sa pensée : la défense de la civilisation néo-latine.

La déclaration de guerre de 1914 atteint cruellement Counson. Il ne peut se faire à l'idée que l'Allemagne, où il a vécu cinq ans et dont il admire la culture, sombre dans la volonté de destruction. Pendant tout le conflit, il se retranche dans une étude solitaire, et médite sur la psychologie des peuples, en imaginant des bases plus sûres pour la paix. Cette réflexion aboutit, après la reprise des cours, à la rédaction d'un ouvrage qui devait être édité en 1929, et devenir une sorte de testament philosophique : La civilisation. Action de la science sur la loi.

Quoique profondément marqué par son incapacité à comprendre les raisons qui avaient poussé l'Allemagne à la guerre contre la France et la Belgique, Counson se veut optimiste. Il faut se débarrasser du poids du passé et avoir foi dans la science qui peut revivifier le monde et le faire progresser. Pour lui, l'établissement d'une saine concordance entre science et loi doit rétablir l'harmonie. Il devient moraliste et n'hésite pas à afficher des tendances réformatrices.

Élu à l'Académie le 20 mai 1922, il tient à sa tribune plusieurs discours, jusqu'en 1925, sur la prédominance de la langue française et son universalité. Il fait dans ce but des voyages à Paris et en Italie, et donne des conférences pour plaider la cause du français, mis en question à l'Université de Gand. Cette défense équivaut, dans son esprit, à soutenir une hiérarchie de valeurs à laquelle il croit fermement, et à mettre en évidence ce qu'il considère comme le plus haut degré de culture. Dans cette optique, le français doit pouvoir unir les hommes et empêcher le renouvellement des conflits. L'utopie s'installe. Elle ne le quittera plus. Ses amis et ses collègues s'étonnent de son intransigeance et de l'importance qu'il accorde à ce qu'il considère comme un apostolat. Il devient un incompris.

Counson ne s'était pas marié. Il avait accumulé une bibliothèque riche de quinze mille volumes. Il meurt d'une tumeur au cerveau, le 15 août 1933. Si son œuvre, peu étendue, a sans doute été limitée par cette mort précoce, elle se caractérise par des qualités de rigueur et d'érudition, de souci moral et de recherche philosophique.

Bibliographie

  • Malherbe et ses sources, Liège, Vaillant-Carmanne, 1904.
  • Dante en France, Paris, Fontemoing, 1906.
  • Mélanges d'histoire littéraire, Louvain, Peeters, 1909-1910.
  • La Pensée romane, Louvain, Uystpruyst, 1911.
  • La Question des langues en Belgique, Gand, Plantyn , 1912.
  • La Civilisation, action de la science sur la loi, Paris, Alcan, 1929.


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