Biographie
François Emmanuel, de son vrai nom François Emmanuel Tirtiaux, est né à Fleurus, le 3 septembre 1952. Son père est patron d’industrie, philosophe dans le cœur et un «intarissable conteur d’histoires». Quatrième enfant d’une famille qui en comptera cinq, il est, par ailleurs, le frère de Bernard Tirtiaux (maître verrier, acteur de théâtre, chanteur et écrivain, auteur du Passeur de lumière, du Puisatier des abîmes, de Pitié pour le mal, etc.) et le neveu d’Henry Bauchau qui fut également l’un des membres de l’Académie. Si cet entourage était propice à l’écriture, François Emmanuel a, de son propre aveu, «toujours écrit et toujours su que son destin était d’écrire».
Après des humanités au Collège des Jésuites à Charleroi, il entreprend des études de médecine, à l’Université catholique de Louvain, suivies d’une spécialisation en psychiatrie (1983). Parallèlement, il est actif dans le domaine théâtral, fondant ainsi le Théâtre du Heurtoir. Entre 1979 et 1980, il interrompt sa formation médicale pour rejoindre le Théâtre Laboratoire de Wroclaw (Pologne) et Jerzy Grotowski, le père du théâtre pauvre, qui lui apprendra à travailler le corps et la voix. C’est là qu’il écrit Archipel, la première version de La Nuit d’obsidienne (Les Éperonniers, 1992, réédité dans la collection «Espace Nord» des Éditions Labor). En 1993, il obtiendra pour ce livre — sorte de conte initiatique où se dévoilent les fondements de sa pensée — le prix triennal de la ville de Tournai.
Il a, par ailleurs, exercé le métier de psychothérapeute au Club Antonin Artaud dont il a assuré la direction et se consacre encore, ponctuellement, à son activité de psychiatre.
Sa toute première publication est un recueil de poèmes, Femmes prodiges (Maison internationale de la Poésie, 1984), car il ne faut pas l’oublier, François Emmanuel, s’il s’est fait connaître comme romancier, est au tréfonds de lui-même, poète. En témoignent, Portement de ma mère (Stock, 2001) et La Lente mue des paysages, un ensemble de son corpus poétique (1982-2003) paru à La Renaissance du livre (2004) ou encore Là-bas (Esperluète, 2006) et Sept chants d’Avenisao (Esperluète, 2010).
Retour à Satyah (Alinéa, 1989, réédité chez Labor, collection «Espace Nord») est le premier roman qu’il publie, tant l’écriture de La Nuit d’obsidienne lui aura demandé de temps, une dizaine d’années en réalité. C’est en 1992 que paraît, outre cette Nuit d’obsidienne, Grain de peau (Alinéa, réédité dans la collection «Espace Nord», 1999). Un ensemble de nouvelles, apparentées aux meilleurs romans noirs ou policiers, qui fait partie de ses publications dites «romans d’été» où l’auteur se donnait à être plus léger avec lui-même. Le Tueur mélancolique (La Différence, 1995, réédité chez «Espace Nord») appartient également à cette veine romanesque où l’ironie et l’humour sont omniprésents. 33 chambres d’amour (Le Seuil, 2016) sont des fictions qui abordent les désirs et les passions amoureuses.
Le Sentiment du fleuve (Stock, 2003 et réédité au Livre de Poche) ou L’Invitation au voyage («Espace Nord», 2003) appartiennent aux deux catégories dont il est présentement question.
D’autres ouvrages sont à verser aux «romans d’hiver», parce qu’ils sont plus sombres, plus graves et parce que l’hiver est en quelque sorte «un contrepoint à la connaissance de la passion». La Partie d’échecs indiens (La Différence, 1994, réédité chez Stock en 1999 puis chez «Espace Nord») est de ceux-là, il concilie «les exigences du roman d’action et celles du conte philosophique». Ce livre vaudra à son auteur, en 1995, les prix des Amis des bibliothèques et Charles Plisnier. Citons encore, dans cet esprit, La Leçon de chant (La Différence, 1996, réédité chez Labor, collection «Espace Nord», 2000). La musique accompagne souvent les livres de François Emmanuel. Pas étonnant donc que La Leçon de chant soit placée sous l’égide de Schubert, à tel point que le phrasé de ce roman rappelle souvent ce musicien.
En 1998 paraît La Passion Savinsen (Stock, réédité au Livre de Poche) pour lequel il reçoit, la même année, le prix Rossel. Une histoire d’amours interdites et de passions, celle d’une mère pour un Juif, et plus tard, celle de la fille pour l’officier allemand; en quelque sorte une tragédie antique. Cette période trouble de notre histoire est également le sujet de La Question humaine (Stock, 2000, réédité au Livre de Poche). En 2007, ce récit, où les manœuvres de la grande entreprise capitaliste sont présentées comme parentes des méthodes concentrationnaires, sera adapté au cinéma par Nicolas Klotz, avec Mathieu Amalric dans le rôle principal et Michael Lonsdale.
Jours de tremblements (Le Seuil, 2010), Cheyenn (Le Seuil, 2011), Le Sommeil de Grâce (Le Seuil, 2015) ou Ana et les ombres (Actes Sud, 2018) sont autant de romans, récemment parus, qui sondent les hommes et leurs secrets.
Il a reçu, en 2010, le prix triennal pour Regarde la vague (Le Seuil, 2007) et le grand prix de la Société des gens de lettres pour l’ensemble de son œuvre.
Il ne faut pas oublier le François Emmanuel dramaturge. C’est ainsi que paraissent Partie de Chasse (Actes Sud, 2007), Contribution à la théorie générale suivi de Joyo ne chante plus (Actes Sud, 2014) ou Les Consolantes (Actes Sud, 2016). D’autre part, Les Voix et les ombres (Lansman, 2007) est un essai rassemblant ses communications à La Chaire de poétique de Louvain-la-Neuve et une belle manière d’approcher l’auteur de La Chambre voisine (Stock, 2001, réédition au Livre de Poche) à propos duquel Patrick Kéchichian écrivait dans Le Monde : « Entre la psychologie et la métaphysique, pour le dire sommairement, il trouve, proche de Pierre Jean Jouve, une troisième voie : celle que les grands tragédiens, et quelques poètes, n’ont jamais épuisée.»
Fran
çois Emmanuel a été élu à l’Académie le 11 octobre 2003, il y succède à Charles Bertin.
– Yves Namur
Bibliographie
- Retour à Satyah, roman, Aix-en-Provence, Éditions Alinéa, 1989 (rééd. Bruxells, Éditions Ancrage, n° 10, 2000; rééd. Bruxelles, Éditions Labor, coll. «Espace Nord», n° 243).
- Grain de peau, nouvelles, Aix-en-Provence, Éditions Alinéa, 1992 (rééd. Bruxelles, Éditions Labor, coll. «Espace Nord», n° 155).
- La Nuit d'obsidienne, roman, Bruxelles, Éditions Les Éperonniers, 1992 (rééd. Bruxelles, Éditions Labor, coll. «Espace Nord», n° 178).
- La Partie d'échecs indiens, roman, Paris, Éditions de La Difference, 1994 (rééd. Paris, Stock, 1999; rééd. Bruxelles, Éditions Labor, coll. «Espace Nord», n° 195).
- Le Tueur mélancolique, roman, Paris, Éditions de La Différence, 1995 (rééd. Bruxelles, Éditions Labor, coll. «Espace Nord», n° 145; rééd. Bruxelles, Labor littérature, 2009).
- La Leçon de chant, roman, Paris, Éditions de La Différence, 1996 (rééd. Bruxelles, Éditions Labor, coll. «Espace Nord», n° 163).
- La Passion Savinsen, roman, Paris, Éditions Stock, 1998 (rééd. Paris, Le Livre de Poche, n° 14893).
- La Question humaine, récit, Éditions Stock, 2000 (rééd. Paris, Le Livre de Poche, n° 15361).
- Portement de ma mère, poèmes, Paris, Éditions Stock, 2001; (rééd. Bruxelles, Labor littérature, 2009).
- La Chambre voisine, roman, Paris, Éditions Stock, 2001 (rééd. Paris, Le Livre de Poche, n° 15524).
- Le Sentiment du fleuve, roman, Bruxelles, Éditions Stock, 2003 (rééd. Paris, Le Livre de Poche, n° 30107).
- L'invitation au voyage, nouvelles, Tournai, Éditions La Renaissance du Livre, 2004 (rééd. Bruxelles, Labor, coll. «Espace Nord», n° 214).
- La lente mue des paysages, poèmes, Tournai, Éditions La Renaissance du Livre, 2004.
- Le Vent dans la maison, roman, Éditions Stock, 2004 (rééd. Paris, LGF, n° 30724).
- Bleu de Fuite, roman, Paris, Éditions Stock, 2005.
- Là-bas, récit (livre-cd), Noville-sur-Mehaigne, Éditions Esperluète, 2006.
- Dousha balit, photographies de Viviane Joakim, beaux-livres, Bruxelles, Husson, 2006.
- Partie de chasse, théâtre, Arles, Actes Sud, coll. «Actes Sud-Papiers», 2007.
- Regarde la vague, roman, Paris, Seuil, coll. «Cadre rouge», 2007.
- Les voix et les ombres, esthétique, Carnières, Lansman, coll. «Chaire de poétique» n° 6, 2007.
- L'enlacement, récit, Paris, Seuil, coll. «Cadre rouge», 2008.
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Discours de réception (séance publique du 24 janvier 2004)
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